Le travail actuel de David Arseneau reflète le monde d’une jeunesse révolue, tant par ses sujets, par ses médiums que par la façon dont il les traite. Son intérêt pour la série Friday the 13th, film d’horreur grotesque des années 1980, a donné lieu, dans SUPER F13 PART 1 TO PART 12 REDESIGN, à un jeu de dépouillement compulsif des personnages et du contexte dans lequel ils évoluent. À l’aide de différents médiums, dans un style malhabile trahissant l’urgence de réalisation, ce thème central lui sert de prétexte pour l’exploration de nouvelles formes d’expression afin d’affirmer son identité, forçant la production et poussant les limites de sa propre réflexion. Portraits robots des participants, esquissés rapidement au crayon (SF13 Characters); jeu vidéo élémentaire organisé telle un état des lieux des différentes scènes autour du lac Crystal (SF13 Video Game); mapping qui compile en un seul paysage tous ces lieux (Titre); inventaire exhaustif de toutes les armes et items utilisées (SF13 Items and Weapons); reproductions fidèles des affiches des douze séries (SF13 Posters), sont autant de déclinaisons laissant penser que l’artiste, dans son désir compulsif de vouloir tout adresser, cherche à extirper la frayeur, afin de mieux la banaliser.
Isolée au centre de la galerie, une petite cellule, reflétant l’enfermement lié à sa pratique, accueille deux postes d’ordinateur qui invitent le public à prendre les commandes d’un jeu subversif. Visitant à nouveau le jeu vidéo, Studio Doom exploite ce médium comme une nouvelle palette créative et dialectique, dont l’artiste se sert pour soulever, à travers son processus de création, des enjeux actuels, tels que la recrudescence de la violence. L’artiste prend pour objet l’atelier, celui qu’il occupe assidûment à la Fonderie Darling, le reconstitue et nous invite à y circuler à travers les écrans. Ce lieu d’intimité, cette « chambre de réflexion » est mise à mal, se transformant en un véritable champ de combat. Les œuvres, présentées dans l’espace d’exposition et reproduites de façon caricaturale dans Studio Doom, sont la cible d’un pilonnage systématique. Nous positionnant du côté du tireur anonyme, qui manipule une arme et exécute les œuvres se présentant dans sa mire, Studio Doom transmet un malaise, une tension entre gravité et dérision. Transformant le lieu de création en chantier de destruction, le langage naïf et obsessif d’Arseneau, à la fois glaçant et attachant, porte sur des enjeux tant esthétique que politique.
Saturant l’espace de la galerie, l’exposition de David Arseneau SUPER F13 PART 1 TO PART 12 REDESIGN STUDIO DOOM, dont le titre évoque à son tour une arme de guerre, nous invite à nous questionner sur notre monde et la façon dont nous tournons en dérision et normalisons la violence.
David Arseneau
David Arseneau est titulaire d'une maîtrise en beaux-arts de l'Université Concordia à Montréal.
Commissaire
Caroline Andrieux