Maggy Hamel-Metsos s’intéresse, à travers cette exposition, aux mécaniques internes du témoignage, qui traduisent notre insatiable désir de voir s’expulser hors de nous nos sentiments les plus vifs. Son investigation prend la forme d’une énigme, composée à partir de fragments épars, trouvés çà et là, qu’elle associe en une fresque mélodramatique aux accents tragiques. Un orgue, rescapé par l’artiste, est maintenu en vie par une série de compresseurs d’air industriels, qui lui insufflent de longs soupirs. Face à lui, des chanteuses d'opéra crient et des enfants pleurent. Leurs images, dénuées de couleurs, sont captives de photographies dont la disposition dans l’espace est calibrée de façon régulière, de telle sorte qu’à l’heure où le soleil culmine, ses rayons, qui s’infiltrent par la fenêtre, viennent se répercuter dans un miroir, avant de converger, par l’effet d’une loupe, vers les photographies, qui s’enflamment et disparaissent, ne laissant alors que quelques cendres comme unique trace. L’artiste les remplacera, dès le lendemain, par d’autres photographies, qui brûleront à leur tour, hormis les jours de pénombre, où des nuages viendront les voiler des rayons du soleil, les épargnant ainsi, pour une journée encore, de leur inéluctable embrasement.

La théorie musicale emploie le terme simile aria afin de désigner une mélodie chantée qui établit une comparaison entre la situation de la chanteuse et un phénomène plus vaste, souvent d’ordre naturel, qui la dépasse et l’excède, et que la musique vient illustrer. L’intime se fond ainsi dans l’ordre cosmique du monde, qui se fond, à son tour, dans l’abstraction musicale. Le drame s’estompe, par le fait même, dans l’eurythmie la plus totale, qui épuise le souffle, fait taire les images et recompose la douleur en symphonie. Notre vie, à l’instar d’un opéra, peut, dès lors, se résumer en une collection de sons calibrés par la cadence de notre respiration. « Nous naissons en criant et c'est ainsi que le soleil se loge dans nos tripes1. »

¹ Citation de l'artiste.