Michael Eddy présente une lecture performative de Wendel’s Institution, un récit de science-fiction dystopique imaginé de concert avec son oncle américain Alex Kreger, en exploitant la forme du podcast comme style et structure narrative. Accompagnée d’effets audio, d’annonces et de références visuelles, une partie du récit sera ainsi lue en vidéo live sur Twitch (twitch.tv), un média social de livestream interactif connu pour sa grande popularité auprès des gamers et des influenceurs à travers le monde. Pour cet événement sur Twitch, Eddy, dans son rôle de streamer, invite les viewers à partager ses fantaisies et à commenter la performance en direct via la fenêtre de chat ou par des appels téléphoniques reçus à la fin de l’émission.

Entremêlant réalité et fiction, le récit de Wendel’s Institution se déroule dans une Amérique ultra conservatrice récemment assujettie à un régime communiste du futur, dans lequel les émotions ont remplacé l’argent comme principale monnaie d’échange. S’affrontent et s’embrouillent plusieurs personnages délurés, comme Harold le trafiquant d’armes qui conspire contre l’État, Matilda l’aristocrate idéaliste, le Colonel Diaz au service des renseignements, « no name » l’énigmatique hacker anonyme, Mark Townsend le mutant intoxiqué à la virilité exacerbée, sans oublier Wendel, le célèbre pathologiste en charge de préserver la santé mentale des ploutocrates déchus.  

Co-écrite par courriel échangés entre l'artiste et son oncle dans les années précédant la dernière élection américaine, l’histoire s’est construite à partir d’un scénario improvisé où chaque partie subséquente est inspirée, plus ou moins consciemment, de celle reçue précédemment et des remarques qui l’accompagnent. Au-delà des péripéties délirantes, la lecture de cette histoire imaginée par Eddy et Kreger captive alors qu’elle révèle une part de l’intime de ces derniers. Ponctué d’affirmations brusques et de sarcasmes espiègles, le récit dévoile les inclinaisons politiques, les positions idéologiques et les frustrations existentielles des auteurs, ce qui engendre un cadre lourd de sous-entendus. Au fil des échanges, l’écart ne cesse de se creuser entre deux visions du monde qui opposent maintes fois le cynisme à l’espoir et l’imagination au pragmatisme.

Les conflits, les malaises et les oppositions qui forment l’ossature de Wendel’s Institution sont en quelque sorte le point de départ de l’exposition Je suis présentée à la Fonderie Darling. Au moyen de cet événement en ligne, l’univers artistique et littéraire contenu dans la Petite galerie est transposé dans le monde virtuel de Twitch, une sous-culture formée de millions d’utilisateurs, générant encore plus de millions de dollars, représentative d’une société américaine obnubilée par la mise en scène de soi et le regard de l’autre. Face aux spectateurs du web, l’expression sur internet de sa propre singularité se construit à même une dynamique fascinante dans laquelle des formes d’émancipation, des situations pernicieuses de cyberharcèlement, de fructueuses réalisations et une apathie généralisée coexistent parallèlement.