Bienvenue dans le monde fantastique de FortMou. Découvrez ses paysages surréalistes peuplés d'êtres monstrueux et inoffensifs qui vous y accueillent.
Laissez vous guider par des formes organiques, coque ou capsule flottantes et disfonctionnelles. Mais sous-jacent à cette fiction envoûtante, à travers un jeu de contradiction et d'excès dans la représentation, Jérôme Ruby questionne cyniquement l'«authenticité» de l'œuvre.
Pour commencer, il y a le titre de l'exposition, «fort» et «mou», qui est un jeu d'opposition telle une «forteresse molle» selon Ruby. La contradiction se retrouve également dans le graphisme emprunté à différents champs de références iconographiques, le style «western» et les logos de multinationales américaines. Par le procédé de la reproduction, des dessins originaux aux traits noirs, non présentés dans l'exposition, sont numérisés et vectorisés, surdimensionnés, puis imprimés à volonté. Soit autant d'étapes éloignant le regardeur de l'œuvre originale, et l'artiste de son œuvre par une désappropriation et une mise à distance de l'acte de création. Abandonnant la matière au profit de l'image, ces épreuves se démarquent de la murale. Leur froideur contraste avec la chaleureuse fresque de faux bois, réalisée directement sur le mur par la main de l'artiste. Luxuriante, elle envahit la surface et prend des allures inspirantes, telles des ombres chinoises à décoder. D'une autre facture, une énorme coquille aux contours noirs, mi-organique mi-animale, peinte à même le mur, est suspendue dans un paysage. À travers ces différentes techniques de représentation, l'artiste interroge la notion d'«authenticité» : une œuvre est-elle autant la reproduction d'un original que la vraie imitation d'un faux? La contradiction, par la distorsion du sens et des proportions, est tout aussi remarquable dans une sculpture jouant encore la démesure : un «Inuk Shuk1» surdimensionné se confond avec l'une des colonnes portantes de la galerie. Fait de morceaux d'un matériau de construction rose bonbon, taillés comme la pierre, «Inuk Shuk» marque un repère incontournable dans le paysage de Fort Mou : que l'on y entre ou que l'on en sorte, le message se transforme en un geste de bienvenue ou d'insulte.
Tout en plongeant le spectateur dans un monde imaginaire et hypnotique, Jérôme Ruby interroge, à travers la diversité des techniques employées, la contradiction et la démesure, l'originalité et la superficialité de l'œuvre.
Caroline Andrieux.
Jerome Ruby
Jérôme Ruby vit à Montréal depuis qu'il y a effectué une résidence à Quartier Éphémère en 2000. Il a fait ses études aux Beaux-Arts du Havre (France) et a notamment exposé au Fresnoy, studio national des arts contemporains, Tourcoing (France) et au Lobe de Chicoutimi (Québec).
Commissaire
Caroline Andrieux