Poursuivant les recherches qu'elle a entreprises il y a plus de 10 ans, l'artiste s'interroge cette fois sur le thème de la Condition romantique à travers des photographies numériques surprenantes et une installation sonore dont les chuchotements trouveront leur écho dans l'architecture industrielle de la Fonderie Darling.
Le regroupement d'œuvres est en effet spectaculaire. Joey Morgan présente l'état de sa démarche en mettant en scène une collection de photographies numériques de coeurs tous aussi différents les uns que les autres.Marqués par des expériences émotionnelles qui laissent parfois des cicatrices, ces coeurs se présentent comme autant d'organes en mutation. Ils évoquent tantôt l'univers végétal tantôt celui du minéral. Or, chaque spécimen peut être vu comme une métaphore de l'existence humaine, comme un portait de vécu.
Esthétiquement très belles, ces photographies numériques jouent sur l'attrait de la singularité. Bien que d'une grande virtuosité technique où l'ordinateur joue ici le rôle du pinceau, ces œuvres nous rappellent l'histoire de l'art dans leur mise en exposition. Elles sont présentées de manière classique et précieuse. Cela séduit et intrigue dans ce lieu brut marqué par sa vocation industrielle. Cette rencontre entre l'œuvre et le lieu fait naître avec succès la poésie prévue par Joey Morgan.
Le deuxième volet de l'exposition est composé de dérivés du premier. Il s'agit en fait de détails maintes et maintes fois recouverts d'un vernis. Disposées comme autant de ponctuations d'une surface, ces petites peintures viennent exprimer ici un rythme, là une intensité. Toujours aussi séduisantes et étranges ces images abstraites nous transportent dans un univers où l'empreinte d'une vie inconnue subsiste.
Puis, vous vous acheminerez, au détour de la visite, vers une installation sonore où la voix humaine se fait chaude et sensuelle à votre oreille. Cette fois la mutation du coeur est évidente. La vie s'égraine avec son lot d'émotions qui façonne l'organe de vie, le centre des émotions, là justement où elles prennent naissance. C'est pourquoi, dans ce repli sombre, le son se fait à peine entendre. Le mystère n'entoure-t-il pas toujours le ressenti ?
Manon Blanchette
Joey Morgan
Au cours des vingt-cinq dernières années Joey Morgan a réalisé de nombreuses œuvres publiques et installations multidisciplinaires qui ont été montrées tant dans des friches urbaines que dans des musées ou galeries aux Etats-Unis, en Australie, au Danemark, en France et à plusieurs endroits à travers le Canada. Mentionnons entre autres, le Musée des Beaux-Arts du Canada à Ottawa, le Power Plant à Toronto, le Musée d'art contemporain de Montréal et la Walter Phillips Gallery de Banff. Joey Morgan a représenté le Canada en 1992 à la Biennale de Sydney et Vancouver en 1996 à Copenhagen's 96 Containers.
Elle a reçu de nombreux prix tant pour ses œuvres en arts visuels que pour ses publications. Détentrice de bourses du Conseil des arts du Canada, du National Endowment for the Arts, du British Columbia Cultural Fund et du Vermont Council for the Arts, Joey Morgan a aussi créé des compositions sonores, des livres d'artistes et des œuvres vidéographiques.
Récemment, elle exposait à la galerie de l'Université de Sherbrooke et au Centre d'art Passerelle à Brest en France. Joey Morgan vit et travaille aux États-Unis.