À l’automne 2019, la Fonderie Darling met à l’honneur les arts visuels de l’Amérique latine. Pour souligner les 10 ans de la Résidence des Amériques soutenue par le Conseil des arts de Montréal, une programmation spéciale autour du travail artistique de deux anciens résidents est proposée aux publics montréalais et canadiens. Dans la Petite galerie, la commissaire porto-ricaine Marina Reyes Franco (résidente 2016) met en dialogue trois artistes des Caraïbes dans l’exposition de groupe Resisting Paradise : Deborah Anzinger (Jamaïque), Leasho Johnson (Jamaïque) et Joiri Minaya (République Dominicaine). Resisting Paradise est l’une des expositions lauréates du programme Open Call de l’organisme apexart à New York et a été présenté à l’été 2019 à l’espace :Pública à San Juan (Porto Rico).

• • •

L’exposition Resisting Paradise [Résister au Paradis] réunit le travail d’artistes jamaïcains et dominicains qui explorent les croisements entre le tourisme, la sexualité, le genre, les enjeux environnementaux, la musique et Internet. Les œuvres sélectionnées et commandées pour cette exposition découlent d’un réexamen de la notion préconçue de « paradis », ainsi que des nouvelles formes de colonisation engendrées par le tourisme. À travers la peinture, la photographie, la sculpture, la vidéo, le design graphique et l’installation, ces artistes convoquent des histoires d’invasion, d’esclavage et d’exploitation économique des ressources naturelles ; ce faisant, ils et elles montrent comment ces dispositifs de pouvoir conduisent à une réification de leur propre corps dans l’imaginaire occidental des destinations touristiques paradisiaques. Le titre de l’exposition est inspiré d’un livre de l’écrivaine bahaméenne Angelique V. Nixon, qui traite des dangers que représente la vie dans ce type de paradis artificiels ainsi que des moyens puissants par lesquels les travailleuses et travailleurs culturels résistent à ces constructions et les transforment.

Dans les Caraïbes, l’expérience commune d’un modèle de développement économique fondé sur la transformation des plantations en centres de villégiature met en évidence la transition de l’esclavage vers une économie de service. L’exposition explore ce qui se produit lorsque l’économie du tourisme affecte également les corps – lorsque le sexe et le désir deviennent aussi des monnaies d’échange. Le projet colonial et l’impérialisme ont laissé une marque indéniable sur la culture caribéenne en façonnant les relations que nous entretenons avec nous-mêmes, les autres et la nature elle-même. Par le biais de la transgression et de l’appropriation, les artistes rassemblés dans cette exposition imaginent de nouveaux paradigmes de vie pour la population de la région et sa diaspora en questionnant les stéréotypes à l’égard du sujet caribéen, défini comme un sujet colonial, racisé et sexualisé.

Marina Reyes Franco
(traduit de l'anglais par Katrie Chagnon)

• • •

L'exposition bénéficie du soutien du Conseil des Arts et des Lettres du Québec et du Conseil des arts de Montréal.

 

      

Deborah Anzinger

Deborah Anzinger est une artiste jamaïcaine qui vit et travaille à Kingston. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions personnelles en Jamaïque mais aussi aux États-Unis, à Porto Rico et au Royaume-Uni. Elle a reçu plusieurs prix et distinctions, tels que la bourse de la Fondation Pollock-Krasner en 2018. 

Leasho Johnson

Leasho Johnson est un artiste jamaïcain. Titulaire d’un baccalauréat en Beaux-Arts de l’Edna Manley School of the Visual and Performing Arts de Kingston, il poursuit actuellement ses études d’art à la School of Art Institute de Chicago. Il a été exposé en Jamaïque et à travers le monde, notamment à la Philharmonie de Paris en 2017, à la Royal West England Academy de Bristol en 2016, et à la Yale University en 2015. Il a participé à plusieurs résidences à New York (Residency Unlimited), à Liverpool (Bluecoat) et à Kingston (NLS).

Joiri Minaya

Née à New York, Joiri Minaya a grandi en République dominicaine. Elle est titulaire d’un Grade d’associé de la Escuela Nacional de Bellas Artes de Santo Domingo, et d’un baccalauréat en Beaux-Arts de la Parsons the New School for Design de New York. Elle a participé à plusieurs résidences aux États-Unis, telles que la Skowhegan School of Painting and Sculpture, Guttenberg Arts et BronxArtSpace. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions personnelles et collectives dans les Caraïbes et aux États-Unis. En 2015, elle a remporté le prix Emerging Artist de la Fondation Joan Mitchell.

Marina Reyes Franco

Marina Reyes Franco (née en 1984) est une commissaire indépendante qui vit et travaille à San Juan, Porto Rico. Elle a cofondé et dirigé le musée La Ene, à Buenos Aires, en Argentine. Parmi ses projets récents figurent : Watch your step / Mind your head, à la ifa-Galerie Berlin ; Calibán, au Museo de Arte Contemporáneo de Porto Rico, à Santurce ; C32: Sucursal, au Museo de Arte Latinoamericano de Buenos Aires ; ainsi que de nombreuses expositions à La Ene. Ses recherches portent sur le travail du poète Esteban Valdés, les manifestations artistiques et littéraires situées aux frontières de l’action politique, la nouvelle muséologie et l’impact du tourisme sur la production culturelle.